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    n’est raisons(R1911, L 102-7, MW 1524,1)
 
Sources manuscritesK : Thierris de Soissons (295-296), notée ; I-IVO : Guillaume li Viniers (main moderne) (53 ro), notée; I-II
 M : Maistre W. li Viniers (106 vo), notée; I-V
 T : Maistre Willelmes (27 ro-vo), notée ; I-V
 a : Maistre Willelme (36 ro-vo), notée ; I-V
 
  
  Éditions antérieures
Winkler, chanson 17, p. 81-83 (texte de M)  
Ménard, chanson XIII, p. 112-117 (texte de T) 
Ulrix, chanson 9, p. 811-814 (texte de a) 
Beck, chanson 129, p. 121 (texte de O)
     
  
  Classement des manuscrits / attribution de la chansonLes variantes permettent mal d'opérer un classement bien précis 
  mais l'hypermétrie au v. 14, entre autres, suggère que 
  MT et a font sous-groupes de la même famille. 
  a s’oppose à MT à plusieurs reprises, s’accordant parfois avec 
  K (v. 33, 34), parfois avec O (v. 2). O 
  offre une version qui s'écarte souvent des autres mss, ce qui tendrait à confirmer 
  l'affirmation de Meyer que ce manuscrit a emprunté un grand nombre de chansons à des recueils 
  d'origine différente [1]. À l'exception de K, tous les mss s'accordent 
  pour attribuer la 
  chanson à Guillaume le Vinier. Dans K, le seul membre de la famille KNV 
  à transmettre la chanson, elle suit 4 pièces attribuables à Thierry de 
  Soissons qui, quant à elles, sont toutes transmises par 
  KNV. O n’offre aucune indication d'attribution, les chansons 
  étant classées par ordre alphabétique. Dans MT, notre chanson est située parmi une longue série de pièces attribuées à Guillaume le Vinier (même ordre dans les deux manuscrits) et 
  a la donne également parmi d’autres chansons attribuées à Guillaume le Vinier. 
  Tout compte fait, l'indication de K, contredite par MTa et
  O, doit être fautive. 
  Établissement du texteComme K omet la dernière strophe, nous avons suivi l'exemple de Ménard en choisissant comme 
  texte de base la version de T, qui offre moins de fautes et 
  d'omissions que M et a (ce dernier surtout étant entaché de 
  nombreuses erreurs).
 Le mot raison au v. 1 (CS) fait atteinte à la rime et à la déclinaison. 
  Bien que, selon Pope (§ 613) et  Meyer-Lübke (§ 221), le début de l'amuïssement 
  du -s final remonte au 13ème siècle, on notera que tous les autres 
  rimes en -ons ont reçu un -s  dans ce manuscrit. Ainsi, nous 
  l’avons corrigé. Les v. 2/3 semblent avoir subi une perturbation au niveau 
  de la rime, ainsi que le montre l'accord de KMT contre Oa 
  au v. 2 et celui de KO contre MTa au v. 3. L'accord de
  Oa fait de leur variante une leçon privilégiée, qui nous 
  semble préférable à la rime grammaticale assez banale de T.
 
 Ménard lit dit au v. 24 (qu'il corrige en die) et j'ai au v. 60, mais nous lisons bien die 
    (image)
 et j'ans 
    (image)
.
 
Interventions
  
  v. 1 - raison : atteinte à la déclinaison et à la rime ; correction 
  d'après OMa ;
	v. 2 - finie : correction en faillie d'après Oa
	;v. 14 -  vers hypermétrique ; correction d'après KO 
  ;v. 53 - vers hypermétrique ; correction d'après a 
    ;v. 60 - ans : forme inconnue ; correction en ai d'après
  
  M. 
  Versification et stylistiqueSept strophes hétérométriques de 12 vers en coblas unissonans.
  La charpente métrique est unique.
  
    | Mélodie : | A | B | C | A | B | C | D | E | F | G | H | I |  |  
    | Schéma : | a | b | c | a | b | c | c | c | b | b | c | b | (MW : 1) |  
    |  | 5 | 9' | 6 | 5 | 9' | 6 | 5 | 6 | 5' | 5' | 5 | 6' | (MW : 1) |  Particularités stylistiques:
 
  rimes dérivées au v. 7/9 : mesdis / die ; v. 18/20/24 : mendis / dis 
  / die ; 
  v. 55/56/59 : empris / espris / apris ; 
  rimes grammaticales au v. 20/24 : dis / die.
 
  
  LangueDans son ensemble, T (d'origine artésienne) présente un texte francien. 
  Nous relevons pourtant quelques traits picards :
  graphie de l'affriquée prépalatale, g pour j francien : giu pour 
    jeu (Gossen 101) ;
  o fermé libre devient ou : chalour pour chalor (ibid., 
  p. 80)
   ;c + e à l'initiale devient ch : ch[e] pour ce (ibid., 
  p. 91) ;
  c + e derrière consonne devient -ce : blance ; 
  cette graphie est plus fréquente dans la région d'Arras (ibid., 
  p. 92) ;c + a à l'initiale garde sa qualité latine vélaire : caure pour 
  chaure, cascuns pour chascuns (ibid., p. 96). La cooccurrence des graphies
  ch +a (chans, chançons, char) et c +a 
  (caure, cascuns, car) et de la graphie qui 
  à côté de ki n'a rien pour nous surprendre : l'œuvre littéraire d'origine picarde offre une alternance de graphies d'une 
  variété souvent extraordinaire et fréquemment dans le même texte. Ainsi que le 
  souligne Gossen (95), l'idée d'une « picardité intégrale » n'existe pas.
 
 
 [1] Cité dans Schwan, p. 119.  |