Hé las ! or ai ge trop duré
(R429, L 258-6, MW 1209,72)

  1. Sources manuscrites

    K : Thierris de Soissons (296 ro - vo), I-V, notée ;
    N : P. d'Angicourt (60 ro), I-V + envoi, notée ;
    V : anon. (93 vo - 94 ro), I-V, notée.
  1. Éditions antérieures

    • Winkler, chanson 14, p. 73-74 : texte de K, envoi de N ;
    • Goffart [1], : texte de N ;
    • Steffens, p. 264-265 : texte de K, envoi de N
  1. Classement des manuscrits / attribution de la chanson

    L'attribution de cette chanson n'est pas sans poser de problèmes. N donne 27 chansons attribuées à Perrin d'Angecourt (dont notre chanson est la dernière), suivies de 11 chansons attribuées à Thierri de Soissons et 12 attribuées à Gilbert de Berneville. K donne 4 chansons attribuées à Raoul de Soissons suivies de 13 pièces attribuées à Gilbert et 21 attribuées à Perrin, puis plus loin dans le manuscrit, comme après-coup, on trouve 6 chansons attribuées à Thierri (dont notre chanson est la dernière), suivies d'une seule chanson attribuée à Gilbert. Dans V, la chanson est placée parmi 19 pièces attribuables à Perrin, suivies de plusieurs unica anonymes.  À l'instar de Steffens et Winkler, l'accord de N et V suffit à nous assurer que la chanson doit être attribuée à Perrin d'Angecourt. Quant à K, son scribe (ou celui de son modèle) s'est sans doute trompé, ayant pris la dernière chanson de Perrin pour la première de Thierri.
  1. Établissement du texte

    N est le seul ms. à donner un envoi ; construit sur les dernières rimes de la strophe précédente, il nous paraît authentique. Les variantes qui séparent K et N étant tout à fait négligeables, nous avons choisi N comme manuscrit de base.
  1. Interventions

    • v. 12 - veé : la rime exige veée ;
    • v. 17 - au : forme inconnue de avoir ; correction en a (leçon de K) ;
    • v. 19 - vers hypométrique ; correction d'après KV ;
    • v. 23 - mi n'a pas de sens ; correction d'après K (voir 8. infra) ;
    • v. 38 - vers hypométrique ; correction d'après KV ;
    • v. 43 - si : le sens exige une conjonction ; correction en se ;
    • v. 43 - vers hypométrique ; ajout du pronom vos.
  1. Versification et stylistique

    Cinq strophes hétérométriques avec deux vers octosyllabiques, trois vers heptasyllabiques, un vers tétrasyllabique et trois vers hexasyllabiques ; chanson unissonante. La charpente métrique est unique.
    Mélodie :  A B A B C D D E  
     Schéma :  a b a b c c d d (MW : 113)
      8 6' 8 6' 4 7 7 7 (MW : 1 )
  1. Langue

    Dans son ensemble, N présente un texte francien. Nous relevons pourtant quelques traits picards :
    • o fermé libre devient eu : dolereusement (Gossen, p. 80) ;
    • -an pour -in étymologique: anemi (ibid., p. 66).
    Le pronom ge figure surtout dans les textes lorrains (ibid., p. 124).
  1. Traduction

    Pour la traduction de la tournure « par un couvent » au v. 29, nous avons suivi la définition de Godefroy : par covent (que) - « à condition, à telles enseignes que, tellement que ».

    Le sens des v. 23 et 24 est problématique. Nous avons corrigé mi en nel (leçon de K) mais l’antécédent du pronom le n’est pas évident. Selon Steffens, l’emploi du pronom est pléonastique et les vers se rapportent au contenu des vers suivants (p. 343), mais cela nous semble peu probable. Faute de mieux, nous comprenons que c’est la haute bonté de la dame plutôt qu’Amour qui fait que l’amant ne subira pas longtemps la mauvause humeur de la dame, car Amour faut défaut à son ami quand il a besoin de lui.


[1] N. Goffart, « Les chansons de Perrin d'Angecourt », Revue de Champagne et de Brie VII (1895), p. 849-872.