Quant
avril et li biaux estez
(R929, L 265-1406, MW 1311,1)
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Sources manuscrites
V : anon. (51 ro - vo), notée.
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Éditions antérieures
- Winkler, chanson 5, p. 44-45.
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Classement des manuscrits / attribution de la chanson
Unicum de V, la chanson est placée parmi d'autres pièces attribuables à Raoul.
L'on remarquera en outre les ressemblances au niveau lexical avec les chansons
R778 et R767 attribuables à Raoul. Vu l'éventail restreint du
vocabulaire et des images utilisés par les trouvères,
ces ressemblances, si frappantes soient-elles, ne constituent guère une preuve irréfutable,
mais elles peuvent donner un certain poids à l'attribution à Raoul. A cet argument s'oppose cependant la
constatation que la
forme métrique utilisée ne se rencontre dans aucune autre chanson de Raoul; en effet, elle est unique dans le
corpus des trouvères.
Tout compte fait, nous classons la pièce sous la rubrique des chansons dont l'attribution à Raoul est possible.
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Établissement du texteLe ms. donne un certain nombre de vers hypométriques, lacunes que nous avons comblées
suivant l'exemple de Winkler.
Au v. 18, nous lisons espouvez (pour esprouvez), contrairement à Winkler,
qui lit esponnez (image).
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Interventions
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v. 11 - vers hypométrique ; ajout de la conjonction de coordination ne
;
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v. 18 - espouvez : lapsus du scribe ; correction en esprouvez
;
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v. 18 - vers hypométrique ; ajout de l'article li ;
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v. 19 - vers hypométrique ; ajout du pronom personnel il
;
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v. 21 - richece : la rime exige une terminaison en –or ;
correction en richor
;
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v. 29 - mi : il manque un verbe ; correction en vis
(proche de ces 4 jambages) ;
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v. 30 - vers hypométrique ; ajout de l'adjectif douz ;
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v. 42 - fier : la rime exige une terminaison en –é ; nous adoptons l'émendation
en fié proposée
par Jeanroy et
Suchier.
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Versification et stylistique
Cinq strophes isométriques octosyllabiques en coblas doblas de dix vers.
Mélodie: |
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Schéma: |
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(MW : 1) |
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(MW : 1) |
Particularités stylistiques
- rime dérivée : v. 11/12 devenir / venir ;
- oxymore / métaphore : v. 37 douz anemiz (évoquant les yeux).
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Langue
Dans son ensemble, V présente un texte francien. Nous
relevons pourtant quelques traces de picard (-o > -ou :
dolour, coulour, meillour, et passim).
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Traduction
Dans l'ensemble de cette traduction, l'adjectif « fin » est utilisé dans son sens médiéval, i.e. courtois, loyal, sincère, etc.
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Destinataire
Le rubis de jovent évoque la personne de Charles d'Anjou (cf. la chanson
R767), lui-même auteur de deux chansons (R423 et R540). Frère
de Louis, Charles, comte d'Anjou et du Maine depuis 1246, roi de Naples depuis 1265,
naquit en mars 1226 et mourut à Foggia le
7 janvier 1285 à l'âge de 59 ans. Il protégeait plusieurs trouvères, parmi lesquels Rutebeuf et Adam de
la Halle. Il figure
dans bon nombre de chansons et de jeux-partis composés par Perrin d'Angicourt, Gillebert de Berneville, le comte de Bretagne,
Jehan Bretel, Lambert Ferri et Audefroi le Bastart.[1] Raoul a dû se battre à
ses côtés au cours de la croisade de 1249.
[1] Cf. Dragonetti,
p. 662-3 et Holger Petersen Dyggve, « Onomastique
des trouvères », Annales Academiae Scientiarum Fennicae série B. vol. XXX
(Helsinki, Suomalainen Tiedeakatemia, 1934), p. 36.
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